This article comes from the journal Sciences et Avenir – La Recherche n ° 897 of November 2021.
Le 9 octobre à Bonn (Allemagne), au Telekom Forum, un concert a célébré le 250e anniversaire de la naissance de Ludwig van Beethoven (1770-1827). Pour l’occasion, et avec un an de retard en raison d’une pandémie, le réalisateur Dirk Kaftan a interprété une interprétation tant attendue de la dixième symphonie du compositeur allemand. Sauf que ce travail n’a jamais existé. En fait, Beethoven est mort en ne laissant que des fragments épars, des idées préparatoires. En 1988, le musicologue britannique Barry Cooper était déjà parvenu à « reconstruire » un premier mouvement de 14 minutes, joué au Royal Albert Hall de Londres. A cette occasion, la partition a été écrite avec une intelligence artificielle (IA), l’IA de Beethoven.
L’IA doit pouvoir extrapoler
Le projet date de deux ans. A l’initiative de Matthias Röder, directeur de l’Institut Karajan de Salzbourg (Autriche), il réunit musiciens, musicologues, experts Beethoven et informaticiens. Tout un défi. L’IA doit être capable de comprendre le style de Beethoven, extrapoler à partir de fragments, savoir lier différentes parties mais aussi maîtriser diverses formes musicales qui apparaissent dans une symphonie (scherzo, menuet), apprendre à conclure un mouvement et orchestrer l’ensemble. « Chacune de ces tâches nécessite un modèle différent. La plupart sont des algorithmes d’apprentissage profond de traitement du langage naturel modifiés pour générer des notes de musique », explique Ahmed Elgammal, informaticien à l’Université Rutgers (États-Unis) et spécialiste de l’IA artistique.
L’équipe a commencé par construire une base de formation avec des œuvres de Beethoven, mais aussi de nombreuses autres qui lui sont contemporaines ou qui l’ont précédé. Ensuite, l’IA les a adaptés au style du professeur pour comprendre comment il composait. Après quoi, les algorithmes ont pu commencer à produire de la musique à partir des fragments de la 10e symphonie. D’abord sous la forme d’une simple ligne mélodique puis sous une forme orchestrale, dans la partition. « C’est un processus itératif, insiste Ahmed Elgammal. Nous n’avions pas de machine capable de générer une symphonie tout de suite. L’IA a été continuellement entraînée. L’équipe a sélectionné, retravaillé, testé et réorienté les extraits sonores des algorithmes. Certains se sont avérés trop modernes, injouables ou injouables. D’autres inattendus, comme un passage d’orgue que l’équipe a conservé, y voyant une manière d’évoquer les tourments du musicien.
Par coïncidence, début septembre, à Lausanne et à Genève, le Swiss Nexus Orchestra a joué une autre version de la 10e Symphonie avec des partitions également écrites par une IA. Mais avec une approche légèrement différente. La technologie développée par le chercheur de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) Florian Colombo s’est entraîné sur les quatuors de Beethoven pour créer les partitions pour tous les instruments de la symphonie, sans intervention a posteriori. « Ce qui a été proposé pour le concert est le résultat de calculs de mon algorithme uniquement », indique le chercheur.
Les pouvoirs prédictifs de l’IA sont exploités
A mi-chemin entre création et récréation, ces projets mettent en lumière un usage bien particulier de l’intelligence artificielle : aider à reconstruire des objets perdus ou endommagés. En principe, ce sont les pouvoirs prédictifs de ces technologies qui sont exploités. C’est-à-dire qu’en fonction du contenu existant, les algorithmes peuvent calculer la probabilité qu’un élément puisse y être ajouté tout en restant cohérent avec le reste. Mais il n’y a pas de solution figée, tout découle de certains choix initiaux : « Je peux forcer un instrument à jouer tel ou tel fragment (de la dixième symphonie de Beethoven, ndlr) et les autres se construiront autour de lui », explique-t-il. Florian Colombo. le résultat final dépendra de l’instrument avec lequel vous commencez. « La musique est loin d’être le seul domaine en question. Cet été, l’intelligence artificielle a permis au Rijksmuseum d’Amsterdam, aux Pays-Bas, de présenter La Ronde de nuit, le célèbre tableau de Rembrandt (1606-1669), complété de fragments disparus il y a 300 ans. Datée de 1642, la toile avait été transférée à la mairie de l’époque (aujourd’hui palais royal) en 1715. Pour tenir entre deux portes, elle était découpée sur les quatre côtés, perdant pas moins de 60 cm à gauche et 22 cm en haut. Dans le cadre d’un grand projet de restauration, le Rijksmuseum a utilisé une copie de La Ronde de nuit du peintre Gerrit Lundens (1622-1686) avant que l’œuvre ne soit amputée Problème : elle ne mesure qu’un demi-mètre carré par rapport au 16 m2 du chef d’oeuvre de Rembrandt.
Un algorithme « envoyé à l’école des beaux-arts »
Le chercheur néerlandais Robert Erdmann a ensuite travaillé sur les copies numérisées des deux tableaux avec pas moins de trois algorithmes. Un premier a établi la « correspondance sémantique » entre les deux tableaux : il a identifié tous les éléments communs (personnages, visages, etc.). La seconde a permis de mettre la peinture de Lundens dans les mêmes dimensions que celle de Rembrandt, en modifiant les volumes, les perspectives, en étirant les formes, afin de superposer parfaitement les deux images. De là, le troisième algorithme a été « envoyé à l’école des beaux-arts » pour reprendre une phrase de Robert Erdmann. Autrement dit, il a utilisé les données de nombreuses analyses réalisées sur la version Rembrandt de La Ronde de nuit (photos, rayons X, scan 3D, ultraviolet) pour apprendre à peindre comme l’artiste.
Ainsi, en prenant la copie de Lundens comme modèle, l’algorithme a pu générer par ordinateur les parties manquantes de la toile dans un style qui imitait celui de Rembrandt. Ces fragments ont été soigneusement imprimés et collés au tableau. Attention cependant : rien ne dit qu’ils sont parfaitement identiques à ceux de 1642. Simplement, l’IA a fourni la version la plus probable.
De même, en 2020, une équipe israélienne a testé un réseau de neurones sur des textes babyloniens gravés sur des tablettes d’argile altérées ou brisées. Après avoir entraîné l’algorithme sur un ensemble de phrases complètes, les chercheurs l’ont amené à un questionnaire composé de 52 autres phrases avec des mots manquants. Parmi quatre réponses possibles, l’algorithme a suggéré la bonne dans 88,5% des cas. Une si belle performance, elle a même surpris les enquêteurs ! Ce résultat valide, en tout cas, l’approche, qui conduira à un nouvel apprentissage des algorithmes pour les améliorer. Son application spécifique servira à donner des indices, à gagner du temps, mais c’est aux experts d’utiliser les résultats comme bon leur semble.
L’identification des mots illisibles sur les tablettes d’argile babyloniennes a été rendue possible par un « apprentissage en profondeur ». Crédits : E. FETAYA ET AL.
C’est le sens du projet RePAIR, qui a démarré début septembre à Pompéi (Italie). Un bras robotique équipé d’un système de vision par ordinateur s’affaire à reconstruire les fresques de la Maison des Peintres au Travail, endommagée par l’éruption du Vésuve en 79 après JC puis par les bombardements alliés de 1943. Près de 15 000 fragments sont en attente. années à assembler, comme un puzzle dont le modèle n’est pas fourni. « La tâche est tout simplement impossible pour les humains », explique Marcello Pelillo, informaticien à l’Université Ca’Foscari de Venise et coordinateur du projet. Nous avons essayé pendant des décennies et avons presque abandonné. «
La machine fait des suggestions aux chercheurs.
Chaque pièce a été scannée en 3D et stockée dans une base de données avec les informations techniques correspondantes (dimensions, structure, couleurs, motifs…). Le bras robotique est attaché à cette base. Avec votre appareil photo vous allez « observer » un fragment, le système va naviguer dans la base de données des scans et consulter ses caractéristiques pour essayer d’identifier quels éléments peuvent être assemblés. Le bras, au bout duquel se trouve une main enveloppée de capteurs de pression, parvient à manipuler les fragments de fresque. « On ne s’attend pas à ce que le robot réussisse du premier coup, mais qu’il donne des premières informations que les experts valideront ou non », prévient Marcello Pelillo. Le travail de la machine est nourri au fur et à mesure de ses allers-retours. Sur la base de ses calculs de probabilité, le système va soit assembler les pièces immédiatement, avant d’attendre la réponse des chercheurs, soit leur faire une suggestion avant toute manipulation. Pour ajouter aux difficultés, certains fragments manqueront sans doute, sans que l’on sache encore combien et où. Peut-être qu’une IA peut générer des copies pour combler les lacunes.
Un bras robotique est entraîné à assembler les images d’un puzzle. Une technologie utilisée pour reconstruire des fresques déterrées à Pompéi. Crédit : PARC ARCHÉOLOGIQUE DE POMPÉI
LE NUMÉRIQUE +
Extraits de la dixième symphonie selon Beethoven AI : sciav.fr/897beethoven
La dixième symphonie achevée par un chercheur de l’EPFL : sciav.fr/897symphonie
Opération Night Watch au Rijksmuseum d’Amsterdam : sciav.fr/897rondedenuit
L’IA face à des textes administratifs babyloniens incomplets : sciav.fr/897babylone
« Ne pas confondre le réel et l’inféré » par Brent Seales, professeur d’informatique à l’Université du Kentucky (USA)
« Les approches d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique pour déduire les pièces manquantes sont utiles. Mais ce ne sont pas des reconstitutions rigoureuses. Ces méthodes ont leur place, mais elles ne peuvent que fournir les meilleures approximations possibles de ce qui a été perdu. Il faut être prudent et ne pas confondre ce qui est réel et ce qui a été déduit et interpolé. Surtout quand il s’agit de textes, où le manque de mots peut conduire à des interprétations ambiguës. De toute façon, on ne saura jamais à quoi ressemblait exactement un objet, pour la simple raison que c’est ainsi que le monde fonctionne, les choses changent au moment où elles sont créées : les couleurs s’estompent, les éléments se cassent, etc. approximations. Cette utilisation de l’IA n’est pas toujours bien acceptée [dans le monde académique]. Tout dépend des applications et des conclusions auxquelles on aboutit.
Beaucoup de gens se méfient de la technologie qui est encore difficile à comprendre et ne révèle souvent pas comment elle atteint ses résultats. Les chercheurs y travaillent, mais créer des systèmes d’intelligence artificielle transparents sur leur fonctionnement, ainsi que sur les forces et faiblesses de leurs résultats, reste un véritable défi. «
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Grand fan de mangas et d’animes, je n’aime bien écrire qu’à propos de ses sujets, c’est pour ca que j’écris pour 5 minutes d’actus. Au quotidien de décortique, donne mes avis sur les différents épisodes et chapitres des mangas que j’aime lire.