La France a déclaré au géant pétrolier TotalEnergies qu’elle avait le devoir d’augmenter les salaires, alors que l’impasse de deux semaines du groupe avec les grévistes se prolonge, perturbant l’approvisionnement en essence et provoquant une crise pour le gouvernement.

Les grèves des dépôts pétroliers et des raffineries du groupe français et du groupe américain ExxonMobil ont réduit la production d’essence de la France de plus de 60 % ces derniers jours, une station-service sur trois étant en difficulté pour le carburant. L’action revendicative s’est étendue cette semaine à d’autres sociétés énergétiques, dont le groupe électronucléaire EDF, où certains travailleurs ont repris leur action revendicative sporadique des derniers mois.

Bien que la ligne de piquetage ait été levée dans une raffinerie clé d’ExxonMobil à Fos-sur-Mer dans le sud de la France jeudi après-midi après la conclusion d’un accord salarial, le syndicat de gauche CGT de TotalEnergies a voté pour continuer à bloquer cinq sites à travers le pays.

Au cœur de l’impasse se trouve la colère face à la crise du coût de la vie et à la montée de l’inflation, alors que le syndicat exige que les travailleurs aient une part des bénéfices élevés des compagnies pétrolières.

Le gouvernement est sous le feu des critiques politiques pour ne pas avoir saisi la gravité de la grève pour des salaires plus élevés, qui a débuté le mois dernier. Les bénéfices exceptionnels de TotalEnergies avaient provoqué une colère généralisée, conduisant à des appels pour que le groupe fasse face à une taxe exceptionnelle. Le gouvernement a toujours refusé, affirmant que les entreprises redistribueraient volontairement leurs gains aux travailleurs.

Le syndicat CGT demande une augmentation de salaire immédiate de 10% pour aider le personnel aux prises avec le coût de la vie, et après qu’une flambée des prix de l’énergie a conduit à d’énormes bénéfices qui ont permis à l’entreprise de verser environ 8 milliards d’euros de dividendes et une offre spéciale supplémentaire dividende aux investisseurs. Comme d’autres grandes compagnies pétrolières, les bénéfices de TotalEnergies ont grimpé en flèche avec la hausse des prix de l’énergie après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a sensiblement changé de ton jeudi, estimant que TotalEnergies avait l’obligation d’augmenter les salaires. Il a déclaré à la radio RTL : « Si l’on connaît les bénéfices qu’elles ont réalisés… les entreprises qui ont la capacité ont le devoir d’augmenter les salaires, et Total en fait partie ». La ministre française de l’énergie, Agnès Pannier-Runacher, a déclaré: « Total doit augmenter les salaires. »

TotalEnergies a ensuite déclaré à l’agence de presse AFP qu’elle proposerait une augmentation de 6% pour l’année prochaine, ce qui était inférieur à la demande de la CGT pour une rétroactivité immédiate de 10% au 1er janvier 2022.

Le coordinateur CGT de l’entreprise, Eric Sellini, a répondu : « Nous n’allons pas négocier par les médias.

TotalEnergies a également proposé d’accorder une « prime exceptionnelle » à tous ses travailleurs dans le monde, équivalente à un mois de salaire. Il a invité tous les syndicats à payer des pourparlers qui commenceraient tard jeudi soir.

Le gouvernement a poursuivi la mesure rare et controversée consistant à ordonner le retour au travail de certains employés de la raffinerie, ciblant pour la première fois le piquet de grève de TotalEnergies à Dunkerque. « La police est venue à leur domicile et leur a fait signer un papier ordonnant qu’ils viennent travailler cet après-midi de 14h jusqu’à 6h demain », a déclaré à l’AFP le responsable syndical FO du site de Dunkerque, Clément Mortier. Le syndicat CGT a lancé une action en justice après que plusieurs travailleurs ont été réquisitionnés mercredi sur un autre site du nord de la France.

La crise est considérée comme préjudiciable pour le gouvernement au milieu de bouchons longs et furieux dans les stations-service et de craintes de réservoirs vides chez certains travailleurs, notamment les aides-soignants des personnes âgées, qui dépendent de leur voiture, ainsi que les transporteurs et les camions frigorifiques pour les livraisons de nourriture. Dans le nord de la France, très touché, certains transports scolaires ont dû s’arrêter.

Le bureau du premier ministre, Élisabeth’s Borne, a cité une « menace économique réelle » pour une grande partie du nord de la France, qui dépend fortement de l’agriculture, de la pêche et de l’industrie.

Le syndicat CGT a déclaré qu’il ferait pression pour étendre la grève à d’autres secteurs, potentiellement avec une grève plus large mardi prochain.