Elon Musk s’adresse au public lors de l’ouverture de sa nouvelle usine Tesla à Austin, au Texas, le 7 avril 2022. (AFP/Archives/SUZANNE CORDEIRO)

Depuis qu’Elon Musk a accepté le rachat de Twitter, il a l’air de passer du bon temps sur son réseau, mais de nombreux experts avertissent que le test de la pratique – gérer un réseau bien connu mais non rentable – peut être difficile.

Le patron de Tesla et SpaceX veut s’emparer du réseau de tweets avec l’objectif affiché d’en faire un bastion de la liberté d’expression indispensable à la démocratie.

Il a également mentionné la fin du spam et de la publicité, des algorithmes open source et de la diversification des sources de revenus.

Mais ces idées avancées à la va-vite ne constituent pas un plan cohérent, elles se contredisent même, constatent des observateurs.

Modération du contenu en premier. « Il va avoir un choc terrible quand il découvrira à quoi ça ressemble vraiment », a tweeté Benedict Evans, un analyste indépendant spécialisé dans la Silicon Valley.

« Dans les années 1990, de nombreux pionniers de l’Internet ont adopté cette éthique libertaire. Ils pensaient que toutes les opinions devaient être ouvertes au débat dans les forums publics », a déclaré Chris Bale, professeur de sociologie à l’Université Duke. « C’est beaucoup plus difficile. »

– Équilibrage –

Siège social de Twitter à San Francisco, qu'Elon Musk a proposé de transformer en refuge pour sans-abri

Siège social de Twitter à San Francisco, qu’Elon Musk a proposé de transformer en refuge pour sans-abri. (AFP/Amy Osborne)

Pour définir des limites, Elon Musk veut coller à la loi. Problème : Twitter doit faire face à de nombreuses lois différentes.

Ainsi, en vertu de la loi américaine, le spam peut être considéré comme la liberté d’expression, note Chris Bale.

En revanche, en Europe, de hauts responsables ont immédiatement rappelé que toutes les plateformes devront mieux traiter les contenus illégaux conformément au nouveau règlement.

En pratique, ouvrir la porte à la désinformation et à certaines formes de harcèlement peut rebuter de nombreux utilisateurs et annonceurs. Les réseaux sociaux de la droite américaine, dont le slogan est la liberté d’expression, échouent également.

Facebook et consorts ont tenté en vain de définir des règles communes, accusés de laxisme et de censure par la gauche, comme Elon Musk.

« Twitter n’est pas une communauté, c’est un tas de communautés qui sont complètement en désaccord les unes avec les autres », a déclaré Casey Fizler, professeur d’éthique numérique à l’Université du Colorado à Boulder.

Une plaisanterie pour certains est un appel à la violence pour d’autres.

– Cuisine intérieure –

Musc et Twitter

Musk et Twitter (AFP/John SAEKI)

Elon Musk prône également une plus grande transparence dans les algorithmes qui organisent les tweets, en priorisant les uns par rapport aux autres, selon chaque profil.

Cette proposition de mise à disposition de programmes (« open source ») suscite un certain enthousiasme chez les utilisateurs qui veulent « voir » les algorithmes.

« Je ne sais pas ce qu’ils pensent. Il n’y a pas de mode d’emploi, ça ne ressemble pas à une recette de sandwich au beurre de cacahuète ! » commente Casey Feisler.

« C’est un système d’apprentissage automatique qui s’appuie fortement sur les données collectées », poursuit-elle. Par conséquent, son ouverture peut entraîner des problèmes de confidentialité.

« C’est une idée noble, portée par la volonté de donner plus de contrôle à chacun », admet Chris Bale.

Mais il y a un risque qu’il soit plus facile pour les trolls et autres mauvais acteurs de promouvoir leurs messages en premier lieu.

Quant aux utilisateurs, « ils peuvent choisir de ne voir que le contenu qui leur convient et s’enfermer encore plus dans leur deck », ajoute-t-il.

Contrairement à la vision « espace public » du multimilliardaire.

-Espèces-

Les principales sociétés d'Elon Musk

Les principales sociétés d’Elon Musk (AFP / Jonathan WALTER)

Certaines des propositions d’Elon Musk pourraient également nuire au modèle économique de la plateforme axé sur la publicité. Il désapprouve cette source de revenus, qui nécessite quand même de lutter contre les contenus toxiques.

« Il n’est pas clair s’il veut créer de la valeur ou s’en tenir à un objectif philosophico-social », a déclaré Gustavo Shved, professeur de finance à l’Université de New York.

Mais même s’il est l’homme le plus riche du monde, l’entrepreneur doit rendre Twitter plus rentable.

Ses prêts bancaires consentis pour cette opération sont en effet adossés à ses actions Tesla, ainsi qu’au profit généré par Twitter… qui a terminé 2020 et 2021 dans le rouge.

Selon ses tweets, Elon Musk aimerait augmenter les abonnements payants, monétiser la diffusion de tweets très populaires, ou encore rémunérer les créateurs de contenus.

« C’était un homme d’affaires et un ingénieur très prospère. Mais il ne s’agit pas d’apprendre à une voiture à se conduire toute seule, c’est un produit humain », a déclaré Chris Leese.

« Prédire le comportement d’un individu est difficile. Et le travail de Twitter est de prédire le comportement d’énormes groupes de personnes.

© 2022 AFP

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