La mort d’un jeune homme juif à Bobigny, au nord de Paris, a choqué la France et suscité l’indignation des candidats à l’élection présidentielle française, qui s’en sont emparés pour dénoncer la criminalité et une éventuelle attaque antisémite.

Jérémy Cohen, 31 ans, a été tué lorsqu’il a été heurté par un tramway à Bobigny en février, ce qui a été initialement signalé dans les médias locaux comme un accident de la circulation. Mais lorsque sa famille a feuilleté la zone pour voir si la population locale avait plus d’informations sur ce qui s’était passé, un témoin a présenté une séquence vidéo, qui a circulé en ligne cette semaine.

Cohen, qui avait un handicap, a été entouré par un groupe d’hommes et agressé. Alors qu’il s’échappait, il a été heurté par le tramway et est décédé peu après à l’hôpital.

Après que la famille de Cohen ait parlé de l’affaire à Radio Shalom, les candidats à la présidentielle ont utilisé la mort pour suggérer que les autorités françaises n’en faisaient pas assez sur l’affaire ou sur la criminalité en général, quelques jours avant le premier tour de l’élection présidentielle.

L’ancien expert de la télévision et candidat d’extrême droite anti-immigration, Éric Zemmour, a été le premier politicien à soulever l’affaire sur les réseaux sociaux, demandant si Cohen était mort à cause de la violence d’un groupe de voyous. « Est-il mort parce qu’il est juif ? demanda Zemmour. « Pourquoi cette affaire a-t-elle été dissimulée ? »

Zemmour a écrit un article de magazine affirmant que l’affaire montrait le « cocktail empoisonné de la France contemporaine », de ce qu’il a appelé un système judiciaire laxiste et de jeunes voyous sans souci de la vie humaine. Il a déclaré que les autorités françaises avaient menti en permanence pour dissimuler la criminalité des immigrés. Zemmour a déclaré dans une interview télévisée qu’il était choqué par le crime et qu’il souhaitait rétablir la « paix » en France.

Le procureur de Bobigny Eric Mathais en conférence de presse.
Le procureur de Bobigny, Eric Mathais, a déclaré que la mort ne devait pas être utilisée à des fins de « manipulation politique ». Photographie : Thomas Samson/AFP/Getty Images

En visite mardi en Bretagne dans le cadre de sa campagne de réélection, le président Emmanuel Macron a déclaré : « Je tiens à exprimer ma solidarité avec la famille de Jérémy Cohen ». Il a déclaré que la vidéo avait « ébranlé » tout le monde, et que la justice devait apporter « une clarté totale sur la situation » et trouver des réponses « le plus rapidement possible ». Le bureau de Macron avait contacté la famille Cohen pour lui exprimer sa « compassion » et son inquiétude.

Marine Le Pen d’extrême droite – qui, selon les sondages, devrait se qualifier pour un second tour contre Macron le 10 avril – a déclaré à la radio française qu’il devait y avoir une enquête parlementaire pour savoir si les autorités avaient délibérément dissimulé l’affaire.

Le frère de Cohen a déclaré à Radio Shalom que sa kippa, ou casquette juive traditionnelle, avait été retrouvée sur le sol sur les lieux, soulignant qu’il ne savait pas s’il la portait au moment de l’attaque.

L’avocat de la famille, Franck Serfati, a déclaré mardi à la radio RMC qu’il n’y avait à ce stade aucune « preuve tangible » d’une agression antisémite et que l’enquête se poursuivait. Serfati a déclaré : « La question à laquelle il faut répondre est : Jérémy portait-il la kippa ? Était-il caché ? Ses agresseurs l’ont-ils ciblé parce qu’il était juif ? Il a dit que c’était à la justice de le déterminer.

Serfati a déclaré qu’en tant qu’avocat, il ne voulait pas que l’affaire soit au centre des préoccupations des politiciens. « Je cherche seulement la vérité auprès du système judiciaire, pour identifier et arrêter les agresseurs et pour qu’ils soient traduits en justice. »

Eric Mathais, procureur de la République à Bobigny, a confirmé qu’une enquête avait été ouverte sur la violente agression. « L’hypothèse selon laquelle la victime aurait traversé les voies du tramway pour échapper à ses attaques a naturellement été prise en compte », a-t-il précisé.

En conférence de presse mardi, le procureur de Bobigny a indiqué qu’il n’y avait aucune certitude à ce stade de l’enquête qu’il y ait eu des mobiles « discriminatoires » derrière l’attaque ou que la victime portait une kippa à l’époque. Il a dit que plus de témoins seraient interrogés.