Les procureurs français ont demandé que l’ancien chef de l’agence de renseignement interne du pays soit jugé pour trafic d’influence et faux.

Bernard Squarcini, qui a dirigé l’agence DCRI – l’équivalent français du MI5 – jusqu’en 2012, est également accusé de complicité d’atteintes au secret professionnel et judiciaire.

L’affaire porte sur des accusations selon lesquelles Squarcini aurait utilisé les services de renseignement et de police français pour aider des intérêts privés, parmi lesquels le plus grand groupe de luxe au monde, LVMH, qui l’a embauché en 2013.

La soi-disant «affaire Squarcini» traîne en longueur depuis plus d’une décennie. Les médias français ont rapporté que les procureurs avaient recommandé aux juges d’ordonner le procès du chef du renseignement, surnommé Le Squale (le requin), et de 10 autres personnes, dont un ancien juge de la cour d’appel, le 23 décembre.

La vaste enquête a suivi le passage de Squarcini au secteur privé après que le président socialiste de l’époque, François Hollande, l’ait démis de ses fonctions de chef du renseignement du pays en 2012 pour avoir été trop proche de son prédécesseur, le président de droite Nicolas Sarkozy.

Squarcini, 67 ans, a ensuite monté une société de conseil, Kyrnos, proposant de l’intelligence économique à ses clients, dont LVMH à qui il est soupçonné d’avoir transmis des informations confidentielles.

Les détectives l’accusent d’utiliser ses relations avec la police et d’autres réseaux de sécurité pour accéder à des informations confidentielles sur des enquêtes en direct. Après une enquête préliminaire ouverte en 2011, Squarcini a été officiellement mis en examen – l’équivalent français d’une inculpation – en 2016.

En juin 2021, des enquêtes supplémentaires ont été lancées à la suite d’allégations selon lesquelles il aurait espionné François Ruffin, désormais député affilié au parti de gauche La France Insoumise (France Insoumise) et des journalistes impliqués dans la réalisation d’un film documentaire satirique de 2016 intitulé Merci Patron ! (Merci, patron !) à propos du patron de LVMH, Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France.

Squarcini a toujours nié tout acte répréhensible.

Les magistrats chargés de l’enquête vont maintenant décider de suivre ou non la recommandation du procureur général et de mettre Squarcini et les 10 coaccusés au banc des accusés.

Bien qu’Arnault ait été interrogé dans le cadre de l’enquête policière complexe, son entreprise ne fera partie d’aucun procès éventuel. En 2021, LVMH, qui comprend les labels Louis Vuitton et Christian Dior et la maison de champagne Moët, a payé une amende de 10 millions d’euros pour régler les allégations selon lesquelles il aurait engagé Squarcini pour espionner des particuliers. Le paiement a permis au plus grand groupe de luxe au monde d’éviter un procès public, mais le juge qui a statué sur le règlement a déclaré qu’il n’impliquait aucun aveu de culpabilité de la part de LVMH et n’était pas un jugement contre l’entreprise.

Le règlement reflète la reconnaissance de « manquements passés, qui appartiennent au passé », a déclaré l’avocate de LVMH Jacqueline Laffont, s’exprimant lors d’une audience avant l’annonce de la décision en 2021.

Les avocats William Bourdon et Vincent Brengarth, représentant un ancien policier qui s’est constitué partie civile dans la dernière affaire, ont déclaré que la recommandation du procureur était « une étape décisive dans une affaire inhabituelle qui implique l’utilisation des services de renseignement pour des raisons privées ».

Aucun délai n’a été donné pour la décision des juges d’instruction sur l’opportunité d’aller en justice.