De temps en temps, le décès d’une célébrité donne le sentiment d’une perte familiale. Pour moi, et pour de nombreux Juifs, la disparition de Chaim Topol en est une. Réputé pour son rôle de Tevye, le protagoniste de la comédie musicale Fiddler on the Roof, Topol est devenu l’archétype du patriarche juif ashkénaze. Aujourd’hui, alors que je me remémore la première fois où j’ai vu le film de 1971, j’éprouve une fascination sincère pour le monde qui s’y révèle, couleur sépia et performances vivantes. Les détails physiques de la vie en shtetl, tels qu’ils apparaissent à l’écran, m’étaient peut-être étrangers, mais les personnages, quant à eux, me semblaient étrangement familiers. De plus, Fiddler on the Roof est autant un voyage musical qu’un voyage historique. Basé sur des nouvelles de Sholem Aleichem, créateur de la littérature yiddish, il offre un récit authentique de la vie des Juifs d’Europe de l’Est avant les premières et deuxième guerres mondiales. ###

Ce film était en quelque sorte mon rite de passage. Il racontait l’histoire de ma famille, qui, comme beaucoup de Juifs britanniques, était arrivée au Royaume-Uni à la fin du 19ème ou au début du 20ème siècle, fuyant les pogroms de l’Europe de l’Est. Jusqu’à ce que je voie Fiddler on the Roof, j’étais loin de me douter que ma famille avait connu une existence différente avant d’arriver à Londres. Mais lorsque les habitants d’Anatevka, le shtetl imaginaire du film, ont emporté leurs maigres possessions et quitté leur village à la recherche d’une vie meilleure, j’ai commencé à comprendre les difficultés qu’ils ont rencontrées. Heureusement pour moi, mes ancêtres ont choisi le Royaume-Uni plutôt que la France, les Pays-Bas ou même l’Allemagne. Je ne sais pas exactement comment ils sont arrivés ici, ni d’où ils venaient, car il n’y a aucune trace de leurs déplacements. Mais grâce à Fiddler on the Roof, je peux en apprendre un peu plus sur qui ils étaient, comment ils vivaient et les défis qu’ils ont dû surmonter pour survivre. Ce film a donné à moi et à de nombreux Juifs ashkénazes un sentiment d’appartenance. Il comble les lacunes des histoires que nos parents et grands-parents ont omises de nous raconter. Quel cadeau, quel héritage ! Je serai à jamais reconnaissant.