EXPO. Le Muséum de Toulouse remet les momies dans tous leurs états – Sciences et Avenir › - 1

– Bon, c’est tout, mais où sont les momies ? Objet de curiosité absolue dans un musée, voire d’admiration, les momies ont la capacité de créer de petites attroupements devant les vitrines où elles sont exposées. Ainsi, la dernière grande exposition du Muséum de Toulouse « Momies, corps préservés, corps éternels » pourra satisfaire le public, qui sera plongé dans l’ambiance dès les premières secondes de la balade : « Memento Mori ! (« Souviens-toi que tu vas mourir ! »), il pourra lire à l’entrée une célèbre phrase latine qui nous rappelle sans ménagement notre état de mortel. Mieux vaut en effet garder cela à l’esprit, pour ne pas réduire nombre d’expositions à de simples spectacles lugubres qui, derrière des vitres teintées – choix judicieux du musée pour préserver la sensibilité de chacun – s’offrent de toutes parts à ceux qui, sur au contraire, désir de les observer.

La momification comme rite funéraire

Dans la première grande partie, consacrée aux momies fabriquées par l’homme, par opposition à celles créées naturellement présentées dans la deuxième étape, les visiteurs apprendront, par exemple, que la momification n’était pas seulement pratiquée chez les anciens Égyptiens, mais qu’elle faisait l’objet des premières tentatives parmi les Chinchorros, il y a plus de 7 000 ans, ils habitaient la côte du désert d’Atacama, entre le Chili et le Pérou.

Shankai « fardo », à l’intérieur duquel se trouvent les restes momifiés d’un enfant, couché la tête en bas. Crédits : M. Benois/Sciences et Avenir

Ils pourront aussi humer les accessoires d’embaumement, comme cela se pratiquait en Egypte (bandes de lin, myrrhe, natron, cire d’abeille, etc.), admirer les « fardos » funéraires de la culture Chankai (1000-1450), enveloppes en tissu anthropomorphes. avec des fausses têtes plus ou moins sophistiquées entourant la momie, ou apprendre qu’au Moyen Âge en Europe occidentale, l’embaumement corporel, pratiqué avec des épices, du sel et des herbes aromatiques, n’était ni plus ni moins que la cuisine. Preuve en est la dépouille du roi Henri 1er d’Angleterre, cuite, apprend-on… par un boucher.

Quand la nature fait son travail

Le voyage se poursuit dans une salle plus éclairée et spacieuse, conçue pour nous montrer que la nature elle-même, qui favorise généralement la décomposition saine des cadavres, peut parfois former des momies qui peuvent traverser des millénaires. Milieux givrés, milieux salins, milieux désertiques, milieux tourbeux… Des milieux propices à la momification naturelle des corps sont envisagés, avec des exemples en chair et en os comme cet impressionnant pied de mammouth sibérien, qui conserve une grande partie de ses poils. , ou encore cette reproduction de l’homme de Tollund, la célèbre momie masculine à la peau d’ébène et au visage d’une expressivité troublante. Trouvé dans les marais du Danemark, une corde autour du cou d’un malheureux mort entre 405 et 380 av. JC, divise encore les savants : était-il un criminel condamné ou une victime sacrificielle ? Le secret demeure.

La momie humaine de Tollund, conservée ici au musée de Silkeborg, au Danemark. Crédits : Christian Kober/Robert Harding Legacy/AFP

Enfin, il ne faut pas manquer l’étrange main momifiée, surnommée la « main verte », dont la peau et plusieurs os exposés ont une teinte bleu-vert intense. Trouvée en 1650 près d’Auxerre, la main, datant probablement de l’époque gallo-romaine, a été incluse dans les collections du Cabinet du Roi, tant son aspect insolite fascinait. Plus tard, on a découvert que cette coloration était causée par une obole en bronze, qui était placée dans la main du défunt afin de lui assurer le droit de passer dans l’au-delà. Ainsi, l’effet antiseptique du cuivre protégeait les tissus de la pourriture et le vert-de-gris les colorait entièrement.

Enfin, la dernière zone fait la part belle à ce que le musée a appelé les « momies scientifiques », témoignage des progrès constants des méthodes de conservation des cadavres. De l’écologie médicale de Jules Talrich, présentée à l’Exposition universelle de 1867, au fantasme futuriste de la cryogénisation par le formaldéhyde et la plastination (cette imprégnation visant à préserver les tissus biologiques en remplaçant divers liquides organiques par du silicone)ils finissent tous par poser une question collante l’éthique de la conservation et, plus encore, la conservation des restes humains.

Momies, corps préservés, corps éternels du 22 octobre 2022 au 2 juillet 2023 au musée de Toulouse.