Lorsqu’Aline Oudin a été obligée de trouver une nouvelle maison pour son cher cheval alezan de 28 ans, Ténor du Pluvinage, elle a passé une annonce demandant si quelqu’un pouvait lui offrir un nouveau terrain pour vivre ses derniers jours.

Un homme dans la soixantaine a répondu qu’il cherchait un compagnon calme pour la jeune jument qu’il avait achetée à sa fille, alors Oudin l’a laissé emmener le cheval avec la promesse qu’elle pourrait lui rendre visite régulièrement.

« Tout s’est passé très vite. Je n’ai pas eu le temps de réfléchir. Le monsieur aimait Ténor et je lui ai accordé ma confiance… J’étais dans une grande détresse de devoir me séparer de mon compagnon de 23 ans », a-t-elle confié par la suite.

« Me voyant en larmes, l’homme m’a réconforté et m’a assuré que mon cheval serait bien soigné et que je pourrais venir le voir quand je le voudrais. Le soir même, l’homme m’a téléphoné pour me dire que le voyage de retour s’était bien passé. Mais quand je l’ai rappelé pour lui demander son nom et son adresse, son téléphone était sur messagerie vocale, puis la ligne a été déconnectée.

Oudin a lancé des appels et des annonces pour tenter de découvrir ce qui était arrivé à son animal. Des mois plus tard, elle a découvert que le cheval avait été envoyé à un abattoir.

Neuf ans plus tard, 18 personnes, dont deux vétérinaires, comparaissent lundi devant le tribunal de Marseille accusées d’être impliquées dans un vaste réseau de trafic illégal à travers l’Europe qui aurait fourni de la viande de cheval impropre à la consommation humaine à des grossistes et des bouchers.

Les accusés, originaires de France, d’Allemagne, de Belgique, des Pays-Bas et d’Espagne, auraient acheté et vendu des milliers de chevaux de trait et de course à la retraite, et même des poneys, qui ont été exportés vers la Belgique où ils auraient reçu de faux documents d’identification et de suivi avant renvoyés dans les abattoirs du sud de la France.

Ils sont accusés d’escroquerie en bande organisée ou de fourniture de biens faux et trompeurs susceptibles de présenter un danger pour la santé humaine et risquent jusqu’à 10 ans de prison s’ils sont reconnus coupables. Huit des accusés sont en détention depuis 2015 après que la police européenne a détruit le réseau continental.

Inscrivez-vous à First Edition, notre newsletter quotidienne gratuite – tous les matins en semaine à 7h00 BST

Mathilde Bloch, la juge d’instruction, a déclaré que les détectives avaient fait preuve « de négligence ou d’action positive démontrant la complicité des deux vétérinaires » accusés de falsification de documents.

Oudin, originaire de Meurthe-et-Moselle dans l’est de la France, est l’un des plus de 150 propriétaires de chevaux qui auraient remis leurs vieux animaux en pensant qu’ils seraient pris en charge dans leurs dernières années.

« J’ai appris après de longues recherches que mon cheval avait été tué alors qu’on lui avait administré des traitements insecticides, vermifuges et anti-inflammatoires qui l’auraient rendu totalement inapte à l’alimentation », a-t-elle déclaré à des journalistes français. « J’ai été profondément blessé. J’ai eu ce cheval pendant 20 ans et il faisait partie de la famille.

Lionel Febbraro, avocat de l’un des vétérinaires, a imputé la confusion sur les règles européennes « incroyablement complexes » à l’implication de son client. « Même si j’avoue que ça ne doit pas être agréable d’apprendre que votre cheval s’est retrouvé à l’abattoir, a priori, personne n’est mort empoisonné », a-t-il déclaré.